ATLANTIS (2017- …)
Atlantis (1959) est l’avant-dernière partition graphique de Morton Feldman. Après avoir abandonné la notation graphique entre 1953 et 1958, il y revient pour approfondir cet équilibre qu’il recherche entre « imprécisions des moyens » et résultats musicaux plus clairs. Feldman souhaite une précision qui ne serait pas unidimensionnelle : « C’était comme peindre un tableau où il y avait toujours une ligne d’horizon quelque part. En travaillant précisément, il fallait toujours “ générer “ le mouvement – il n’y avait pas encore assez de plasticité pour moi.[1] » En travaillant avec cette idée de retour à la plasticité, Côté reprend un fragment de chacune des pages (no 5, II a; no 6, III a et no 7, IV a) de cette partition en transcrivant littéralement sur la toile la graphie feldmanienne des indications et des signes.
La particularité de cette nouvelle série repose sur l’apparition des caches qui servent à délimiter les zones peintes et à les protéger d’éclaboussures lorsque la couleur est appliquée. Toutes ces nombreuses caches à la géométrie irrégulière sont peintes en transparence. À leur conjonction, un carré gris dans lequel le peintre laissera les traces de l’emploi de toutes les couleurs. Un journal quotidien du travail d’exécution du tableau. Et toutes ces opérations sont rendues visibles par cette accumulation successive des caches colorées venant ainsi briser le caractère « unidimensionnel » imposé par la rigidité des lignes de géométrie euclidienne. La couleur rencontre la musique sur un mode non pas subjectif, mais entièrement à l’intérieur « d’un tempo général donné ».
[1] Feldman, M. (1998). « Autobiographie (1962) » in Écrits et paroles. Paris : L’Harmattan. P. 132.
crédit photo Guy L’Heureux